À l’heure où certains États membres de l’Union Européenne durcissent leur politique d’accueil des réfugiés et cherchent à fermer leur frontière, le gouvernement portugais propose un message d’ouverture : il peut et veut accueillir davantage de migrants. Jusqu’à présent, le pays n’a pratiquement pas reçu de demandes de protection internationale.
Lisbonne a peiné à accueillir… 32 réfugiés
En septembre, un plan global a défini la répartition de 160 000 réfugiés sur l’ensemble des territoires des États membres. Depuis, le processus tarde à se mettre en place. Alors que des centaines de migrants arrivent chaque jour en Grèce ou en Italie, le Portugal est parvenu à en accueillir… trente-deux. Au total, notre pays peut pourtant recevoir 10.000 migrants.
Jusqu’à présent, la situation géographique du Portugal a été l’un des principaux obstacles à la venue des réfugiés. Les routes migratoires ne passent pas par ici. La situation financière, économique et sociale du pays, avec ses programmes d’austérité drastiques, n’ont pas aidé non plus à rendre le Portugal attractif. Les pays plus développés et plus riches présentent, aux yeux des migrants, de meilleures opportunités de travail. Ces pays ont également une plus grande tradition d’accueil, contrairement à nous. Historiquement, nous sommes une terre d’émigration.
Accueillir des réfugiés pour sortir de la crise économique
Évidemment, la motivation première du pays est d’aider les demandeurs d’asile, qui fuient la guerre et les violations de leurs droits fondamentaux. Nous devons leur donner l’opportunité de reconstruire leur vie ici. Pour autant, il y a également un vrai besoin pour le Portugal d’accueillir des migrants. À ceux qui craignent que la venue des réfugiés ne menace la reprise économique et financière… C’est tout le contraire. Bien sûr, il y a un investissement initial, à court terme, pour pousser ces migrants à être autonomes. Je pense à leur apprentissage de la langue, leur formation professionnelle, la reconnaissance de leurs compétences…
Mais ensuite, ils seraient un véritable catalyseur pour le développement du pays. Ils représenteraient autant de contributeurs indispensables pour alimenter notre système de protection sociale, dont on connait les déséquilibres démographique, du fait d’une population vieillissante. On estime en effet à 3 600 000 le nombre de retraités au Portugal. Sur le long terme, l’arrivée 10 000 réfugiés sur notre marché du travail leur permettrait ainsi de contribuer à la stabilisation de notre réforme des retraites.
Occuper les zones désertées par les Portugais
Il nous apparaît donc primordial que les réfugiés se tournent désormais vers le Portugal. Nous travaillons activement à l’établissement de plans d’intervention locaux, relayés sur les réseaux sociaux, dans des zones désertées, du Nord au Sud du pays. Il y a là beaucoup d’opportunités dans les métiers de l’agriculture et de la forêt : travail de la terre, mécanisation, commerce agricole… Ce secteur a été délaissé par les Portugais, en particulier les jeunes. Ceux-ci sont partis à l’étranger à la recherche de nouvelles opportunités. L’arrivée de migrants dans ces régions dépeuplées peut ainsi restimuler l’économie locale et encourager le développement de nos régions.
Je pense notamment à Santarém, à Ribatejo, et à la province de Baixo Alentejo, ainsi qu’aux villes de Guimarães, dans la région Nord, et Sintra, dans la région de Lisbonne, qui ont mis en place, avec le CPR, plusieurs dispositifs de formation technique, ainsi que des programmes de sensibilisation dans l’opinion publique et dans les écoles.
D’autres municipalités accueillent déjà des réfugiés : Penela et Torres Vedras, dans la région Centre, et Penafiel dans le Nord. Le CPR fournit aux réfugiés un accompagnement administratif et des interprètes.
La solidarité fait la force du peuple portugais
Une partie de la population portugaise a pris conscience de l’opportunité que représente l’arrivée de réfugiés chez nous, et soutient ces initiatives. Mais beaucoup manifestent aussi contre leur venue. Ils craignent une infiltration terroriste dans le pays et continuent de croire que les réfugiés viendraient leur voler leurs emplois.
Après des siècles d’émigrations, nous avons aujourd’hui la mission d’informer les Portugais, de démanteler les stéréotypes et de mettre en avant la solidarité qui fait la force de notre peuple.
Source : l’OBS Le Plus